Les violences sexuelles en contexte de conflit : des informations complètes et pratiques pour mieux la comprendre, l’appréhender et y faire face

Cette page a pour objectif d’offrir à la fois des informations générales sur les différents types de violences sexuelles qui peuvent survenir en contexte de conflit, mais aussi des informations pratiques. Vous trouverez les contacts de différents services d’aide et d’associations qui existent en Belgique pour soutenir les victimes de violences sexuelles en contexte de conflit.

Selon les Nations Unies, les civils et surtout les femmes et les enfants, représentent la grande majorité des victimes dans les guerres d’aujourd’hui. Durant ces conflits, les femmes sont bien souvent victimes de violences sexuelles. En effet, les violences sexuelles commises sur les femmes lors de conflits armés constituent une forme de violence très répandue bien qu’elle soit peu connue et rapportée.

Les violences sexuelles sont parfois utilisées systématiquement dans les conflits armés dans le but d’atteindre des objectifs militaires et/ou politiques.​

Le viol comme arme de guerre

Le viol comme arme de guerre est une tactique militaire employée pour terroriser la population, détruire les familles et les communautés. Ces viols ont pour objectif principal de provoquer, à terme, l’exode des populations vers les villes et de permettre à d’autres de s’approprier les ressources naturelles du pays/de la région.

Les violences sexuelles sont employées tant par les groupes paramilitaires que par les armées gouvernementales et les groupes armés non étatiques. Certaines violences peuvent aussi être commises par des agents du maintien de la paix, et ce malgré la tolérance zéro imposée par l’ONU à ses membres.

Le viol comme arme de guerre est une tactique militaire utilisée dans le but de déstabiliser et de terroriser une population. Il a pour objectif de détruire des communautés, et dans certains cas, de changer la composition ethnique des générations suivantes. Parfois, le viol sert aussi à transmettre délibérément aux femmes le VIH. En République démocratique du Congo (RDC), selon un rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW), le viol est utilisé pour « punir les civils appartenant à un groupe ethnique particulier, ou parce qu’ils sont accusés de soutenir l’ennemi ».​

Qui est concerné ?

Les cas de violences sexuelles liées aux conflits armés sont rarement dénoncés. Les raisons qui poussent les femmes à ne pas dénoncer ces faits sont :

  • La peur des représailles ;
  • L’insécurité ambiante ;
  • L’absence de services d’aide ;
  • L’impunité des auteurs, autrement dit l’idée que la dénonciation ne sert à rien étant donné que, dans la plupart des situations, les auteurs de violences sexuelles restent en liberté sans être inquiétés. Lorsque les victimes font part de ce qu’elles ont vécu, c’est souvent car elles ont besoin de recevoir une aide médicale et/ou psychosociale.

Selon un rapport du Conseil de sécurité des Nations Unies, la Colombie, la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo, la Lybie, la Birmanie, la Somalie, le Soudan du Sud et le Soudan (Darfour) sont des pays en conflit où des violences sexuelles sont régulièrement perpétrées. Ainsi, les institutions des Nations Unies évaluent à plus de 60.000 le nombre de femmes qui ont été violées durant la guerre civile en Sierra Leone (1991-2002) et 40.000 au Liberia (1989-2003). Toujours selon l’ONU, entre 250.000 et 500.000 femmes ont été violées au cours du génocide du Rwanda de 1994 et plus de 200.000 femmes auraient souffert de violences sexuelles depuis 1998 au Congo.

La République démocratique du Congo (RDC) où la situation de conflit s’éternise à l’est du territoire depuis plus de deux décennies, est un des pays les plus gravement touchés par la pratique du viol comme arme de guerre. En RDC, de nombreuses femmes sont enlevées par des rebelles. Elles sont ensuite emmenées dans des camps appartenant aux rebelles où elles sont violées à plusieurs reprises. Parfois, elles sont enfermées dans ces camps pendant plusieurs années. Lorsqu’elles sont libérées ou parviennent à s’enfuir, bien souvent, elles ne savent emmener dans leur fuite que leur plus jeune enfant. Les violences sexuelles peuvent aussi perdurer après les conflits.

Pour aller plus loin au sujet des viols commis en RDC, consultez une analyse réalisée par les Soralia : N. BRODER, Vingt ans de violences sexuelles dans l’Est de la RDC : Indignons-nous !, 2015.

Quelles conséquences sur la santé ?

En parallèle de ces conséquences physiques et psychologiques, le viol comme arme de guerre a d’autres impacts, plus spécifiques, qui sont d’ordre social.

  • La stigmatisation et la marginalisation

Les victimes survivantes de ces viols et les enfants nés de ces violences se retrouvent bien souvent stigmatisé·e·s et marginalisé·e·s. Dans de nombreuses sociétés, les croyances et les préjugés considèrent les victimes de violences sexuelles comme responsables de ce qui leur est arrivé. Dans ces communautés, le viol est souvent assimilé à l’adultère. Dès lors, à leur retour (après leur libération ou leur fuite), les femmes victimes de viol et les enfants nés de ces violences font l’objet de discriminations répétées, et leurs droits sont limités. Par exemple, le droit à la parole leur est souvent retiré et ces femmes ne peuvent plus prendre part à certaines activités collectives telles que préparer le repas ou encore cultiver et participer aux récoltes.

Dans les sociétés traditionnelles, il arrive fréquemment que le mari rejette son épouse violée, par divorce ou par répudiation (l’homme décide alors de « renvoyer » son épouse). Lorsqu’il décide de poursuivre la vie commune, il prend bien souvent ses distances et peut aller jusqu’à la maltraiter. Les raisons qui poussent les hommes à rejeter leur femmes sont multiples : ils redoutent qu’elle soit atteinte d’une infection sexuellement transmissible, qu’elle soit enceinte et/ou ils se sentent déshonorés par un acte qui est assimilé à l’adultère.

Si la femme victime de viol est célibataire, elle risque, à son retour, d’être chassée du domicile familial ou, si elle est tout de même ré-accueillie dans le foyer familial, d’être humiliée et injuriée par les membres de sa famille. Les femmes victimes de viol comme arme de guerre peuvent aussi se trouver dans l’incapacité physique (coups et blessures) et/ou psychologique (traumatisme, dépression) et/ou culturelle (dans certaines communautés, les victimes ne peuvent par exemple pas préparer le repas pour leurs enfants) de s’occuper de leurs enfants. Et, si elles sont en mesure d’assurer leurs responsabilités parentales, elles peuvent se montrer irritables et agressives envers leurs enfants. Ce type d’agression sexuelle a donc également un impact sur les capacités parentales de la victime ainsi qu’indirectement sur tout son entourage.

  • En ce qui concerne plus spécifiquement les enfants nés de ces viols, ils sont souvent abandonnés, rejetés ou même maltraités

Ces enfants font l’objet de discriminations, comme en recevant une alimentation différenciée ou en ne bénéficiant que d’un accès restreint aux soins de santé, contrairement aux autres enfants de la famille. En République Démocratique du Congo, les enfants nés de ces viols ayant eu la chance de rester avec leur mère sont considérés comme des « enfants-serpents » et sont rejetés par le reste de la société. Les enfants nés de ces viols peuvent également être considérés comme un danger pour l’avenir de la société. Au Congo, la majorité des enfants nés de ces viols ne sont pas déclarés : ils n’ont donc pas la nationalité congolaise. Certains de ces enfants vivent avec les milices, abandonnés dans les forêts et ne reçoivent pas d’éducation. Ils risquent ainsi de devenir des enfants-soldats. Et après ? Que vont-ils devenir ? Comment vont-ils grandir ? Avec quels repères ? Souvent, on parle de véritables « bombes à retardement » en évoquant ces enfants.

Enfin, nous constatons que dans les sociétés où le viol comme arme de guerre est perpétré, cette violence sexuelle est banalisée. Le viol reste, dans la majorité des cas, impuni. Au courant de cette impunité, les hommes pensent donc, de plus en plus, qu’ils sont autorisés à forcer les femmes à avoir des relations sexuelles sans consentement. ​​

Pour plus d’informations sur les conséquences générales du viol sur la santé, voir « Quelles conséquences sur la santé ? » dans la section Viol.

Vers qui me tourner ?

​Il n’existe malheureusement pas de services spécialisés dans les viols comme arme de guerre. Il est donc conseillé aux personnes concernées de prendre contact avec des professionnel·le·s spécialisé·e·s dans la thématique globale du viol (dans la section Viol).

  • ASBL Ulysse – Service de santé mentale spécialisé dans l’accompagnement de personnes exilées
    Rue de l’Ermitage, 52 – 1050 Ixelles
    +32 (0)2 533 06 70
    ulysse.asbl@skynet.be
  • ASBL WAPA International – ASBL qui récolte des fonds afin de soutenir des petites associations locales qui luttent pour la réinsertion des victimes de guerre (ex-enfants soldats, veuves de guerre, orphelins, déplacés internes…) dans des pays post-conflit à travers le monde et de renforcer ainsi les capacités locales
    Avenue Napoléon, 22 – 1420 Braine-l’Alleud
    Solveig : +32 (0)472 488 691 – Véronique : +32 (0)476 370 349
    wapa@wapainternational.org

Les violences sexuelles liées aux migrations

Que ce soit lors de leur exil, au sein d’une zone de transit ou encore dans les camps de réfugié·e·s situés dans les pays d’accueil, les femmes migrantes sont victimes de violences sexuelles de manière très fréquente.

Ces violences sexuelles subies par les femmes en situation d’exil sont de différents types. Les principaux sont le viol et l’exploitation sexuelle. En effet, durant leur parcours migratoire, ces femmes en situation d’exil font face à des violences sexuelles, à travers les viols qu’elles peuvent subir et à l’exploitation sexuelle exercée par certaines personnes de pouvoir abusant de leur vulnérabilité les forçant à avoir des rapports sexuels en échange de services ou d’argent.

Il peut s’agir de passeurs qui, en échange d’un rapport sexuel forcé, permettent aux femmes d’embarquer sans payer dans leur bateau ; d’agents de sécurité ou de police qui, avec ou sans contrepartie, agressent ces femmes.

Ces violences sexuelles sont d’autant plus présentes au sein des zones de transit ou des camps de réfugié·e·s puisque, dans ces endroits, chaque pièce est commune aux femmes et aux hommes (les pièces de vie, les chambres, les douches, les toilettes, etc.). Cette situation favorise les violences sexuelles et augmente le traumatisme vécu par les femmes victimes car tout autre personne présente dans la pièce est témoin de ces faits. Cependant, la plupart du temps, aucune plainte ni témoignage n’est déposé auprès des autorités, par peur de représailles et/ou par honte d’avoir été victime ou témoin.

Qui est concerné ?

Peu de femmes dénoncent les violences sexuelles qu’elles subissent lors de leur trajet d’exil. Et ce, pour diverses raisons :

  • ​La honte : honte d’avoir été victime et/ou de ne pas avoir pu empêcher que ces violences sexuelles se produisent.
  • La culpabilité : reproches envers soi-même, impression d’être l’élément déclencheur des faits, de les avoir provoqués.
  • Le sentiment d’insécurité : sentiment de ne pas avoir été protégé·e par autrui, qui est accentué lorsque les violences sexuelles subies sont perpétrées par un agent de sécurité ou de police.
  • La peur de vengeance : crainte que l’agresseur reproduise les violences sexuelles si la victime en parle à une autre personne ou si elle dépose plainte auprès de la police.
  • L’absence de prise en considération : les violences sexuelles sont insuffisamment prises en compte par le personnel des zones de transit, des camps de réfugié·e·s, par la police et par les pouvoirs politiques.
  • La crainte du rejet par autrui : peur du rejet des autres car la victime est perçue comme bafouée/salie par les violences sexuelles vécues ; peur du rejet du mari/compagnon.

Une recherche effectuée par Amnesty International​ auprès de femmes migrantes arrivant de Syrie et d’Irak montre que la majorité de celles-ci ont été et sont encore exposées à des violences physiques et sexuelles, à l’exploitation sexuelle et au harcèlement sexuel durant chaque étape de leur trajet migratoire, y compris sur le territoire européen pour certaines. Sur 40 réfugiées interrogées s’étant rendues en Grèce depuis la Turquie, toutes affirment avoir été menacées de viol et/ou avoir subi directement des violences sexuelles et ce, parfois, en échange de services. Ces actes sont perpétrés par des passeurs, des employés chargés de la sécurité ou d’autres réfugié·e·s. C’est-à-dire, dans la majorité des cas, par des personnes qu’elles ne connaissent pas.

Cette étude met également en évidence le fait que ces violences sexuelles ont lieu dans n’importe quel endroit. Cela peut se produire sur le bateau lors de la traversée, dans une ruelle sur le chemin de l’exil, dans une zone de transit ou encore au sein d’un camp de réfugié·e·s. Aucun endroit ne paraît sûr pour ces femmes, la peur et le sentiment de menace sont donc constamment présents.

Pour aller plus loin dans la réflexion, consultez une analyse rédigée par les Soralia : A. MICHEZ, Les violences sexuelles relatives aux migrations et à l’exil​, 2016.

Quelles conséquences sur la santé ?

La non-divulgation et l’absence de représentations des violences sexuelles subies par les femmes réfugiées ont de fortes répercussions sur leur santé. Différentes conséquences sont observées chez ces victimes. Il s’agit de conséquences physiques, psychologiques et sociales entre autres.

Sur le plan physique, trois types de séquelles sont observés :

  • ​Conséquences physiques aiguës : blessures, chocs, maladies, infections, SIDA/VIH, etc.
  • Conséquences physiques chroniques : invalidité, maladies somatiques, infections chroniques, troubles de l’alimentation, troubles du sommeil, etc.
  • Conséquences sur la santé sexuelle et reproductive : fausses couches, IST, SIDA/VIH, troubles gynécologiques, etc. De plus, il y a également un risque important de grossesses non désirées et d’avortements puisqu’aucune protection n’est utilisée lors de ces viols. Précisons que les avortements peuvent être dangereux s’ils sont effectués dans de mauvaises conditions sanitaires ou par des non professionnels de l’IVG.

Au niveau psychologique :

  • Un stress post-traumatique ;
  • Une peur persistante ;
  • Un sentiment de honte, de culpabilité ;
  • Une sensation d’insécurité ;
  • Des idées suicidaires s’installent chez de nombreuses victimes.

En ce qui concerne les conséquences sociales, les plus récurrentes sont le rejet social et l’isolement.

D’autres conséquences liées à d’autres formes de violences sexuelles peuvent également apparaître. Pour plus d’informations, consultez les rubriques de ce site consacrées au viol, à l’exploitation sexuelle et au harcèlement sexuel.

Vers qui me tourner ?

Téléchargez le fichier reprenant les structures vers lesquelles vous tourner en cas de violences sexuelles liées aux migrations.

Des réponses à vos questions

Vous êtes victime et/ou témoin de violences sexuelles ? Vous vous posez des questions concernant les violences sexuelles ?

Vous souhaitez en savoir plus sur le travail de notre Fédération en matière de violences sexuelles ?

Des ressources pour les professionnel·le·s

Télécharger les ressources

Pour aller plus loin sur la thématique du viol comme arme de guerre, découvrez notre fichier ressources comprenant des ouvrages, des brochures, des articles et des sites internet.

Télécharger les ressources
Télécharger les ressources

Pour aller plus loin sur la thématique des violences sexuelles liées aux migrations, découvrez notre fichier ressources comprenant des ouvrages, des brochures, des articles et des sites internet.

Télécharger les ressources
Télécharger le cadre légal

Pour aller plus loin sur la thématique du viol comme arme de guerre et les violences sexuelles liées aux migrations, découvrez les législations nationales et internationales.

Télécharger le cadre légal

Les campagnes d’information et de sensibilisation de la Fédé

Les autres sous-dossiers